Champs électromagnétiques de surface cartographiés en 3D à l'échelle nanométrique

Nœud source: 836493

nanocube de MgO en champ proche
Reconstruction 3D du champ électromagnétique entourant un nanocube d'oxyde de magnésium. Les trois modes (I, II, III) représentent les différentes absorptions d'énergie du nanocube. © G. Habelferner, Université de Graz

La première carte tridimensionnelle du champ électromagnétique qui "s'accroche" à la surface d'un cube de moins de 200 nm de diamètre jette un nouvel éclairage sur la façon dont les matériaux dissipent la chaleur à l'échelle nanométrique. Les images, obtenues par des chercheurs en France et en Autriche, révèlent la présence d'excitations de type photon infrarouge appelées polaritons de phonons de surface près de la surface du cube - un phénomène qui pourrait être exploité pour évacuer la chaleur perdue des composants nanoélectroniques et ainsi les refroidir.

Les phonons sont des excitations vibrationnelles collectives de type particule (ou vibrations atomiques) qui se produisent dans les solides ioniques. Ils donnent naissance à des champs électriques oscillants, qui se couplent aux photons à la surface du solide pour créer des polaritons de phonons de surface (SPhP). Ces hybrides d'excitations vibrationnelles et photoniques ne se trouvent qu'à la surface d'un objet et sont donc généralement de peu d'importance dans les matériaux massifs. Cependant, leur influence augmente considérablement à mesure que les objets rétrécissent et que leur rapport surface/volume augmente.

Les SPhP concentrent également l'énergie électromagnétique dans l'infrarouge moyen (3 à 8 mm) jusqu'à l'infrarouge lointain (15 à 1000 mm). Cette propriété pourrait permettre de les utiliser dans des applications telles que la spectroscopie améliorée (Raman) de molécules.

Visualisation du champ proche

Toutes ces applications dépendent du champ électromagnétique nanostructuré qui existe à la surface des métamatériaux ou des nanoparticules. La visualisation de ce champ dit proche s'est cependant révélée difficile. Des techniques pionnières comme la spectroscopie de perte d'énergie électronique (EELS), qui fonctionne en mesurant l'énergie que les électrons perdent lorsqu'ils rencontrent ces champs de surface, ne peuvent produire que des contours 2D. D'autres techniques utilisent des algorithmes de reconstruction sophistiqués en combinaison avec EELS pour générer des images 3D du champ, mais celles-ci étaient auparavant limitées aux longueurs d'onde visibles.

Dans le nouveau travail, Mathieu Kociak et des collègues du CNRS/Université Paris-Saclay, ainsi que Gérald Kothleitner de l'Université de technologie de Graz, a combiné des modèles informatiques avec une technique appelée imagerie spectrale tomographique EELS pour imager le champ 3D entourant un nanocristal d'oxyde de magnésium (MgO). Pour ce faire, ils ont utilisé un microscope électronique à effet tunnel (STEM) de nouvelle génération développé pour la spectromicroscopie électronique et photonique qui peut sonder les propriétés optiques de la matière avec une énergie et une résolution spatiale ultra-élevées. L'instrument (un NION Hermes 200 modifié appelé « Chromatem ») filtre un faisceau d'électrons de 60 keV avec un monochromateur pour produire un faisceau avec une résolution en énergie comprise entre 7 et 10 meV.

Technique d'inclinaison

En balayant ce faisceau d'électrons sur leur échantillon, Kociak, Kothleitner et leurs collègues ont collecté des images annulaires à champ sombre à angle élevé qui ont révélé la forme du nanocube de MgO. Ils ont ensuite incliné l'échantillon à différents angles, imagé le cube dans différentes orientations et enregistré un spectre EELS à chaque position de balayage. Enfin, ils ont utilisé des techniques de reconstruction d'image pour générer des images 3D du champ entourant le cristal.

La nouvelle approche, qu'ils décrivent dans Sciences, permettront à terme de cibler des points précis sur le cristal et de mesurer les transferts thermiques localisés entre eux. Étant donné que de nombreux nano-objets absorbent la lumière infrarouge lors du transfert de chaleur, la technique devrait également fournir des images 3D de ces transferts. "Il s'agit d'une piste d'exploration pour optimiser la dissipation de la chaleur dans les composants de plus en plus petits utilisés en nanoélectronique", expliquent les chercheurs.

L'équipe prévoit maintenant d'appliquer sa technique pour étudier des nanostructures plus complexes. Cependant, Kociak raconte Monde de la physique que « certains aspects théoriques doivent encore être mieux compris » avant que cela ne soit possible.

Source : https://physicsworld.com/a/surface-electromagnetic-fields-mapped-in-3d-at-the-nanoscale/

Horodatage:

Plus de Monde de la physique